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03/08/2011

Pourquoi réinventer la roue ?

A chaque fois que je me promène dans un musée, je suis sûr de rester scotché quelques minutes trop courtes devant au moins un tableau, ainsi Oreste, la Mort, Caron ou Saint Sébastien se sont gravés dans mes yeux et m’ont permis de me reposer un peu pendant mes visites. Face à ces beautés irréelles, je suis toujours resté dubitatif quant à l’intention du peintre, forcement, la première interprétation qui me vient à l’esprit est celle de l’homoérotisme et même si je voudrais qu’elle soit la seule et unique explication, mon côté rationnel me dit qu’elle est fausse au moins en partie. Je sais qu’il faut au moins rajouter la notion d’« académie », de représentation de la mythologie et/ou de l’Histoire et l’histoire elle-même pour comprendre le but de ces tableaux. Armé de doutes, je me suis dit que je devais creuser la question pour pouvoir présenter un avis correcte et non biaisé par mon goût des hommes.
La tâche est ardue et pas simple lorsque, d’un côté, les ressources en ligne sont trop nombreuses et, d’autre part,  elles ne sont pas forcement accessible à cause d’un pare-feu digne de la censure pékinoise. Au milieu d’elles, j’ai trouvé un article qui met en forme les arguments que j’ébauchais dans ma tête et surtout qui démontre –bien mieux que moi- mon hypothèse. En effet, il faut partir du fait « qu’un tableau […] est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs dans un certain ordre assemblées* », le sens qu’on voudrait lui attribuer n’existe pas forcement. Il serait ainsi erroné de déceler dans tout nu une vue érotique, par exemple, l’objectif d’une académie –représentation d’un modèle masculin nu- était d’évaluer la technique du peintre pour reproduire précisément l’anatomie et non un quelconque désir de la chair. Lorsque ce dernier est reproduit volontairement, l’assimiler systématiquement à de l’homoérotisme revient à  « négliger, de manière passablement machiste, le fait que les femmes puissent avoir du désir pour le corps nu des hommes. Un bel homme, en effet, ne plaît pas seulement aux homosexuels, il peut plaire aussi aux femmes hétérosexuelles et, dans certains cas aussi, aux hommes hétérosexuels »** Quand on arrive en fin à trouver un tableau légitimement homoérotique, il ne faut pas oublier de le raccrocher à sa période car le lire avec les codes actuelles rend l’interprétation largement anachronique et donc fausse. Regarderions nous avec les yeux d’un critique du XIXè ou XVIIIè siècle la version de Pierre et Gilles de l’enlèvement de Ganymède ? Alors pourquoi on interprète avec notre contexte la version de Rubens –du Prado ou de Vienne ? Il reste à savoir pourquoi la première impression ressentie en voyant un bel homme peint, photographié ou in vivo a une connotation homoérotique mais cela est une autre histoire.

*Citation de Maurice Denis,
**Extrait de L’homoérotisme mis à nu, Georg-Friedrich, Italians do it better, samedi 16 janvier 2010

Commentaires

C'est gentil d'exhumer un vieil article.

Pourquoi nous ressentons les choses ainsi? Ben je dirais parce que nous sommes gays et que notre perception est structurée par notre histoire personnelle et nos schémas mentaux qui n'ont pas ou plus grand chose à voir avec ceux qui équipaient la perception des artistes de l'époque. À condition d'avoir le temps et l'envie, tout l'effort de vision consiste à réinscrire le tableau dans son temps, dans son genre, dans le mouvement où il a pris naissance et dans les problématiques spécifiques qu'il entendait traiter.

Bel été à toi au milieu des académies...

Écrit par : GF | 04/08/2011

Je suis d'accord avec toi. Sauf que cet été je crois qu'il va falloir parer les académies d'une maille tricoté et d'un parapluie

Écrit par : Mers | 08/08/2011

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